En direct : Figaret dans la course - Spa Classic #2

Suite : LES QUALIFS.

Les 6 à 7 tours que j’effectue pendant mon run de qualification me conforte dans la bonne préparation de la Jaguar.

Côté mécanique, la Type E tourne impeccablement, comme une horloge, à présent que nous avons retravaillé le haut moteur avec des arbres à came « racing », elle prend allègrement 6000 tours, accouplée à un pont « standard – long » , cela ressemble à un bon compromis sur un tracé long comme celui de Spa Francorchamps. Côté châssis, l’entêtement paie, entre assiette déséquilibrée, arrière trop bas, capot trop haut, puis un rien bas, il nous aura fallu quelques tentatives avant de trouver le réglage idoine, c’est enfin chose faite, la voiture est équilibrée, stable, plus ferme qu’auparavant, assez neutre.

Chaque passage du raidillon provoque des sensations fortes, un mélange de concentration et de plaisir intense ; je tente différentes approches, passage à fond dans le pif paf et remontée en glisse assez acrobatique, au tour suivant, léger frein et rétrogradage avant le pif paf pour l’attaquer à fond de 3, ou encore plus tard passage à fond de 4, rétrogradage en 3 au pied de la remontée et ascension du raidillon pied plancher avec une belle motricité. En fait mon choix n’est pas fait, je suis incapable de dire ce qui passe le plus vite. En revanche, je garde constamment à l’esprit les conseils de Gaël, ne surtout pas mettre les roues sur le vibreur du haut dans ces conditions de pluie, gare à une sortie de route qui serait fatale à la voiture à cet endroit redoutable.

A l’entame d’un de mes derniers tours, alors que je dois bientôt confier le baquet à Christian, je me fais deux belles frayeurs.

J’aborde Blanchimont à fond, ce long gauche qui nous mène à la Chicane juste avant le retour sur le virage de la Source est un des moments fort du circuit, il se négocie très vite, à la limite, et il faut rester vigilant à ne pas mettre les roues sur l’extérieur là où l’adhérence est nulle sous la pluie.

En ligne de mire la Porsche « Gulf » de Claude Lejean, un camarade avec qui nous avons farouchement bataillé sur le circuit du Vigeant au Tour Auto. Le circuit plus rapide de Spa convient bien à la Type E, je reviens vite sur la N°26, à son approche je me présente à gauche, intérieur du virage, c’est préférable en cas de glisse de la Porsche 2L, Claude reprend l’intérieur, pas certain qu’il m’ait vu, qu’à cela ne tienne, je pique à droite pour passer à l’extérieur.

Arrivé à sa hauteur, la Porsche se rapproche de la Type E, je suis serré sur l’extérieur, pas question de freiner, le mouillé ne le pardonnerait pas sur cet appui rapide ! La Porsche sert davantage encore la Jaguar, les autos vont se toucher, je n’ai plus le choix, je mets deux roues dans l’herbe détrempée, à 150 ou 160 KM/H dans ces conditions plus que précaires je vais aller au tapis c’est certain et je risque d’y entrainer Claude.

Je sers les dents, maintiens les roues droites autant que possible et garde du gaz, interdiction absolue de freiner, mon passage dans l’herbe me semble interminable, la Jaguar ne bronche pas et finit par ressortir sans la moindre amorce de glisse, inespéré.

A présent j’aborde la Chicane, une Cobra me passe férocement, trop peut être, elle part en tête à queue devant mon capot, coup de volant et changement de cap pour l’éviter, il est grand temps de penser au relais du co pilote !

Arrêt au stand, je saute de la voiture, accolade à Christian qui s’installe à son tour. Je tente un ou deux conseils « vas-y tu peux prendre 6000 tours, elle tourne bien », et poursuis par « attention c’est une patinoire, ça sous-vire et l’avant bloque facile », « c’est chaud régale toi ! ». C’est pour ces moments furtifs toujours chargés en émotion et en complicité que nous nous engageons toujours à deux en endurance.

Christian sera impeccable, il boucle ses tours sans fougue, avec la sagesse d’un métronome, histoire de nous assurer de bien prendre le départ de la course samedi après midi.

Sortie des qualifications, nous faisons le tour du paddock, pour échanger à chaud. On retrouve les amis, les copains, les complices et inconditionnels du Tour Auto, du Mans Classic, des Dix Mille Tours…

Spa Francorchamps, le plus beau circuit du monde, a la faculté de rendre un sourire radieux à quiconque s’assoit dans un baquet, et le ciel toujours aussi menaçant ne gâche rien, seul compte l’art de négocier le long ruban et sa merveilleuse piste.

Au cœur du réceptif FIGARET les invités du vendredi ont suivi, incrédules, aux premières loges depuis la terrasse du raidillon, la bagarre des qualifications. Instants conviviaux, où le partage est maître, chacun de nous raconte « sa » course, savoureux !

Reste à régler l’ordre de départ de la « vraie » course celle des 120 minutes du Sixties Endurance du samedi, le timing du passage de relais et mettre en place le plan du ravitaillement.

Je prendrai le premier relai, changement à 60 minutes et complément de 20 litres d’essence pendant l’arrêt au stand obligatoire entre la 45ième et la 75ième minute.

A l’issue des qualifs nous occupons la 23ième place, à une grosse poignée de secondes des meilleures Porsche 2L, mention passable, peut mieux faire !

[To be continued...]

Texte : Ludovic Le Boeuf
Photos : www.photoclassicracing.com